Le Règne de Sdach Kân (1512-1525) : Le sacrifice.
Après le ralliement des troupes de la province de Pursat à sa cause, Ta Meung avait un objectif en tête : installer sur le trône du Kampuchéa l’héritier de la maison royale des anciens rois khmers. Ce Royaume n’avait jamais connu la paix. Il s’élevait sur un fond de flammes et de sang. Du fond de son histoire montaient la rumeur des épées et le sifflement des flèches et les cris des mourants après chaque bataille. Cette fois-ci, il avait fallu d’édifier la vraie paix. Pour la faire, il fallait encore une fois passer par la guerre. Il semble que pour les Khmers, la guerre était une fête et le jeu tuait. Ils avaient toujours soif de mourir. Dans ce but, Ta Moeung envoya un messager pour inviter Preah chanrechea à venir s’établir dans sa ville conquise. Ce dernier en était content. Il se souvenait bien de cet homme de cœur. À la tête de ses troupes, bannières au vent, il fut pressé de se rendre à destination. Entrant dans la ville soumise, sa joie fait place à l’extase. Des milliers des soldats et la population qui lui attendirent crièrent « Vive le Roi ! ». Le battement des tambours de victoire invite toutes les divinités du royaume à venir saluer le nouveau souverain. Les deux mains se joignent au niveau du menton, Preah Chanreachea cria de sa monture : « Merci ! et Vive le Kampuchéa ! ».
Pour gagner la confiance de la population, Preah Chanreachea imposa une discipline de fer à ses guerriers : « Interdire de toucher les biens du peuple ». Celui qui ne respecte pas cet arrêté sera condamné sur le champ à la peine capitale. La population en était content et elle remercia Preah Chanreachea.
Pour remercier Ta Meung, Preah Chanreachea lui combla de titre Ponhea Sourlauk et le nomma gouverneur de Pursat. Il conféra aussi le titre nobiliaire aux quatre fils de ce dernier et les nomma généraux des armées d’avant-garde, de droite, de gauche et d’arrière-garde :
Keo, fils ainé, Ponhea Vongsa Akak Reach ;
Anh, second fils, Ponhea Baratesh Reach ;
Tep, troisième fils, Ponhea Vibol Reach ;
Sok, le quatrième fils, Ponhea Reach Tekchak.
Après quoi, il ordonna aux quatre nouveaux Généraux de conduire une troupe de 800 soldats pour investir les préfectures des provinces de Krakor, Klong et Krang.
Revenons à Sdach Kân ou Preah Srey Chetha (nom de règne), à 11h du matin, il amenait avec lui quelques concubines pour aller se baigner dans sa piscine privée et ensuite il amena sa favorite laotienne dans sa cabane royale, située au milieu du jardin féerique pour se détendre. Sa concupiscence s’éveillant, comme fait tous les êtres humains, il amena sa belle au paradis. Après quoi, il s’endormit et eut un rêve : Il voit le soleil se lève à l’Ouest qui brûle son palais. La chaleur est insupportable, il s’est brûlé tout son corps et il s’enfouit vers le Nord-Est du pays.
À 15 h, il s’était réveillé et il eut peur tout d’un coup. Il réclama un devin et Brahmane du palais pour interpréter son rêve. Il demanda d’abord au devin de l’interpréter. Avant de parler devant le roi, le divin toucha trois fois la terre de son front et dit ceci :
« Votre Majesté, ce rêve est un mauvais augure pour vous. Vous aurez un danger grave. Un ennemi qui viendra vous détruire ».
Ayant entendu cette prédiction, Kân se mit en colère et pensa tout de suite à l’outrage. Il demanda au Brahmane, attachée à sa famille royale, pour interpréter son rêve. Ce dernier savait qu’il ne puisse pas dire la vérité au roi, parce qu’il n’accepte jamais d’entendre des propos qui ne sont pas favorables à sa personne. Il chercha donc à interpréter autrement de ce maudit rêve pour sauver sa peau. Avant de parler au roi, il touchait trois fois la terre de son front et dit ceci :
« Selon le calcul sidéral, vous êtes éclairé par des divinités du palais de votre bonheur dans le futur : 1. « Le soleil se lève à l’Ouest », signifie que votre règne se rayonne comme la lumière du soleil, le peuple vit en paix et le Royaume se prospère ; 2. « Le soleil se jette du feu et brûle le palais », signifie que votre pourvoir se répande partout dans le pays comme la lumière du soleil ; 3. « La chaleur vous envahisse votre corps », signifie qu’il y ait un ennemi qui vient vous mesurer ; 4. « La pleine lune », signifie que l’ennemi soit membre de votre famille, il vient de l’Ouest ; 5. « Votre fuite vers le Nord-Est du pays et le feu vous poursuit », signifie qu’en cas d’attaques d’ennemis, vous deviez partir au Nord-Est pour vous défendre. Dans cette rivalité, vous serez le vainqueur. Ce rêve présente un bon présage pour vous, ne vous en inquiétiez pas, conclut le Brahmane ».
Preah Srey Chetha était satisfait de ces explications, mais pour être sûr de sa chance, il ordonna au Brahmane de sonner la conque marine, de faire la libation avec l’eau lustrale et de lui offrir une feuille de Phneuv (nom d’un arbre) pour fixer à l’oreille. Le roi offrit aussi cette feuille à son fils préféré, âgé de cinq ans pour qu’il la fixe à son oreille. Il récompensa le Brahmane selon ses mérites. Il insulta le premier devin devant tous les membres de la cour. Il dit que ce divin ne l’aime pas, c’est pourquoi qu’il avait interprété son rêve pour sa perte. Ayant entendu ces propos, le divin se manifesta son désaccord et dit au roi que son interprétation était juste et celle du brahmane était erronée. Cette revendication irritait la colère du roi, il sauta de son lit royal avec l’épée à la main, tua ce devin sans jugement.
Dix jours après, dans la salle d’audience, Preah Srey Chetha fut informé par Preah Lompaing Thipathey, son ministre, qu’il a reçu une lettre du gouverneur de Pursat. Celui-ci n’avait même pas terminé sa phrase, un autre ministre, Preah Reach Vora Noukol, dit au roi qu’il vient de recevoir aussi une lettre du gouverneur de Krakor dans laquelle il informa à Votre Majesté que le gouverneur de Pursat est déjà mort. La citadelle de Pursat est investi par l’armée de Preah Chanreachea. Le Prince nomme Ta Meung, chef des morts, gouverneur et chef des armées avec un titre nobiliaire Chao Ponhea Sourkirlauk (Grand général Sourkirlauk). Il élève aussi les quatre fils de Ta Meung au rang de général de son armée. Ces quatre fils ont investi avec succès la préfecture de Krarkor.
Apprenant cette mauvaise nouvelle, Preah Srey Chetha secoua doucement sa tête et dit à son général Chakrey ceci : « Grand frère, je vous nomme Grand général de l’Ouest et vous demande de partir dans cette région pour lever une armée pour combattre contre Preah Chanreachea. Aidez-moi de toute votre force, je vous en supplie ». Ponhea Chakrey accepta la mission et répondit à son roi : « Cette fois-ci, je vais faire face à un tigre ; mais rassurez-vous, Votre Majesté, si je n’arrivais pas à le capturer vivant, je le blesserais à mort au moins pour lui donner une leçon ». Le roi étant comblé de joie, il remit à son général son javelot Kram, symbole de l’autorité suprême. Ce dernier quitta la capitale pour s’établir son quartier général dans la citadelle de Longvek (Pour fabriquer ce javelot, on mélange un peu d’or dans le fer, parce que dans ce temps-là on croit que l’arme devienne efficace, qui puisse même couper ou blesser un homme se prétendant un être invulnérable). Il ordonna à son oncle, Samdech Chao Fa Keo, de conduire une grande armée à Kompong Siem. Il donna à ce dernier son sabre royal (même fabrication que celle du javelo), symbole de l’autorité suprême du roi, une vase en or et deux tambours de guerre.
Arrivé à Kompong Siem, lChao Fa Keo envoyait une lettre au gouverneur de la province d’Asantouk, dans laquelle il ordonna à ce dernier de marcher avec son armée sur Battambang pour attaquer Ponhea Chanreachea par arrière. Le but de manœuvre était de fermer la porte de fuite de ce dernier. Quant à lui, il attaquera l’armée du prince Chanreachea par l’Est.
À la tête de son corps expéditionnaire, le Grand général Chakrey organisait son plan d’attaque de façon suivante : une armée de droite de 10 000, commandée par le gouverneur de Phnom-Penh ; une armée de gauche de 10 000 hommes, commandée par Ponhea Preah Reach Vora Noukol, gouverneur de Samron tong et une grande armée de 15 000 hommes, commandée par lui-même. Arrivé à Krakor, l’armée du général Chakrey était en face de celle du général Moeung. Ce dernier opérait son armée de la façon suivante : un régiment de choc de 2 000 hommes, commandé par son fils aîné, un régiment de droite de 1 000 hommes, commandé par son deuxième fils, un régiment de gauche de 1 000 hommes, commandé par son troisième, un régiment d’arrière-garde de 1 000 homme, commandé par son quatrième fils, une division de réserve de 4 000 hommes, commandée par lui-même.
Keo, le fils aîné, avait reçu l’ordre de son père d’attaquer le bataillon de chasse d’ennemis, commandé par un certain colonel Dekchô. Keo fonçant droit en avant, comptant sur son cran, cria à plein gosier : « À l’attaque ». Environ 2 000 soldats des deux côtés s’entre-tuaient dans un espace serré. Vu Dekchô de près, Keo poussa son cheval à la rencontre de son ennemi. Surpris par cette attaque inattendu, Dekchô tira brusquement la bride de son cheval qui provoque l'égarement de celui-ci. L’animal se persécuta à un arbre qui provoque la chute de son maître. Keo ne laissa aucune chance à son adversaire. Il frappa un coup de sabre sur la tête de ce dernier. Dekchô mourut sans même pas le temps de souffrir. Mais à la fin Keo se battait à la retraite, parce que les renforts d’ennemis étaient arrivés en grand nombre.
À leur tour, les deux autres fils de Moeung s’engagèrent dans la bataille contre les troupes des gouverneurs de Phnom-Penh et de Bati. Dans ces mêlés, Le cheval du gouverneur de Bati sursauta, parce qu’un de ses pieds s’enlisa dans un trou, son maître perdit l’équilibre et tomba à terre. Vu la détresse de son ennemi, Chao Ponhea Vibol Reach, se précipita pour le frapper à un coup de sabre, le blessa gravement à l’épaule. Ce dernier fut sauvé à la justesse par ses hommes. Vu la détresse de son compagnon, le gouverneur de Phnom-Pend ordonna à ses troupes de battre en retraite. Cependant, le général Chakrey arriva sur les champs de bataille et ordonna au gouverneur de Phnom-Penh de ne plus désengager dans la bataille contre les fils de Moeung. Il envoya immédiatement des renforts pour soutenir les assauts de son gouverneur.
Ayant informé par le messager que ses fils avaient des difficultés pour résister à l’attaque des ennemis en nombre supérieur, Moeung monta sur sa monture, partit avec ses unités d’élite pour faire sortir ses enfants de ce pétrin. La bataille durait jusqu’à l’aube. Moeung perdait 60 hommes. Mais, il arriva à ouvrir une brèche pour ses troupes de ses enfants de sortir de la nasse d’ennemis. Après quoi, il retourna à la citadelle de Baknim (non de la commune) pour faire un compte-rendu complet à son prince. Il conclut dans son rapport oral ceci : « Pour le moment rien n’est possible. Le Ciel disposera des choses en temps voulu. Il faut laisser agir le non-agir ».
Le lendemain matin, l’herbe encore mouillée de la rosée, le Grand général Chao Fa, à la tête de 50 000 hommes, arrivait à la porte de la citadelle de Baknim. Il organisa son armée de façon suivante :
- Une armée d’avant-garde de 30 000 hommes, commandée par le général Chakrey;
- Une armée de gauche de 20 000 hommes, commandée par le gouverneur de Phnom-Penh ;
- Un régiment de droite de 1 500 hommes, commandé par le gouverneur de Longvek ;
- Une armée d’arrière-garde de 16 000 hommes, commandée par le général Chao Ponhea Sangkram, gouverneur de Bâribo ;
- Une Grande armée de 40 000 hommes, commandée par lui-même.
Face à une nuée d’ennemis, le prince Chanreachea ne possédait que 20 000 hommes pour défendre la citadelle. Mais à chaque assaut de ces derniers, il avait pu les repousser avec des jettes de pierres, des flèches, et armes à feu. Dans cette bataille, ce n’était pas la quantité qui faisait la loi, c’était plutôt la capacité à mobiliser la volonté et la détermination des hommes à se battre. Vu des difficultés à briser les murs de la citadelle, Chao Fa changea la technique pour épargner la vie de ses hommes. L’enjeu de cette bataille pour lui était détruire la puissance d’ennemis de la région de Pursat. Pour lui, qui contrôle Pursat, contrôle le Grand Lac, riche en poissons. Il faut donc qu’il gagne cette bataille. Il ordonna à ses généraux de retirer leurs troupes à une distance d’environ un kilomètre de la citadelle et de l’assiéger pour épuiser les vivres d’ennemis. Près de douze mois d’encerclement, les vivres commençaient à manquer dans la citadelle. La morale des assiégés va à vau-l’eau. Ponhea Moeung s’en aperçut. Il en parla à Ponhea Chanreachea. Au cours d’une réunion d’État Major, le général Moeung dit ceci à son prince : Le temps de laisser d’agir le non-agir est arrivé. Je vous demande donc la permission de partir pour lever une armée des morts pour combattre les ennemis. Il faut faire vite, parce que nous sommes dans le temps des morts. Chanreachea était stupéfait par ces propos, il dit : « Mon oncle, sauf le respect que je vous dois, comment vous avez parlé ainsi. Depuis la nuit des temps, je n’ai jamais entendu qu’on puisse lever une armée des morts pour combattre celle des vivants. Eh bien, il ne faut plus en parler, je vous en supplie ». Ayant entendu ces propos, Moeung sortit immédiatement son sabre du fourreau, mit la lame à son coup, et dit : « Votre Altesse, si vous aviez de doute sur mes devoirs, il ne me reste que de couper ma tête pour vous prouver ma sincérité. Et je ne veux plus vivre voir notre pays va à vau-l’eau. Certes depuis la nuit des temps, personne n’ait jamais entendu parler l’armée des morts, parce qu’aucun « chef des morts » (Mé Smeug) n’ose pas non plus faire sacrifice de sa vie pour ramener des morts au monde des vivants. En tant que Chef des morts, je vais faire ce sacrifice pour aider le pays… ». Vu la détermination de Moeung, Ponhea Chanreachea se précipita pour ôter le sabre de la main de Moeung et lui dit : « Mon oncle, je vous crois ! ».
Moeung avait un ami, nommé Chan. Ce dernier était aussi un Chef des morts de la montagne de cardamomes. Moeung dit à son ami : « Tu sais très bien quand je serai dans l’autre monde, je ne pourrai plus communiquer avec Preah Chanreachea. En revanche, je pourrai communiquer avec toi, parce que tu es Chef des morts. Tu devras faire l’intermédiaire entre le Roi et moi ».
Parmi les concubines de Ponhea Chanreachea, il y avait une dame, nommée Khieu (couleur bleue). Celle-ci était enceinte de sept mois. La dame Khieu était adepte de culte des morts. Depuis qu’elle a entendu parler de sacrifice de Moeung pour lever une armée des morts, elle se portait volontaire pour aider ce dernier à préparer la cérémonie. La préparation était ceci : On creuse un fossé d’une forme de carrée de quatre bras de chaque côté, dont la profondeur est de huit bras. On construit un autel de divinité de sept étages pour déposer des objets rituels, Baysey (objet rituel en tronc de bananier), parfums etc. Le fossé est clôturée et en bas, on dresse des piques.
Une fois la préparation fut terminée, Moeung s’habillait en blanc, se mit à genou pour faire son dernier salut à son Roi, ensuite il tourna vers son ami Chan, lui dit : « À pleine lune de ce mois d’avril, quand tu entendras des bruits venant du ciel, de la terre et partout, tu diras au Roi de quitter la citadelle pour lancer des attaques contre les ennemis ». Quand il termina sa phrase, s’avança vers le fossé en pas décidé, accompagné des sons de musique PinPeat, et sauta dans le fossé. La dame Khieu se précipita vers le fossé et y sauta aussi pour aider son héros à lever une armée des morts. Les quatres fils de Moeung, dont nous avons parlé ailleurs, accoururent vers le fossé pour suivre son père dans le monde des morts. Mais les soldats avaient pu empêcher à la justesse deux des quatre à ne pas sauter. Ces deux enfants étaient Sok et Keo.
Quelque temps après, pendant la nuit de pleine lune, on entend des bruits venant du ciel et du fond de la terre. Tout le monde était effrayé par ce phénomène. Chan, l’ami de Moeung, demanda l’audience au Prince Chanreachea pour lui dire ce que son ami défunt lui avait demandé de faire. Le Prince ordonna aux généraux d’ouvrir la porte de la citadelle et de lancer des attaques contre les assiégeants. Les cris des assauts des assiégés et les bruits mystiques mettaient l’armée de Kân dans un état de frayeur indescriptible. Les soldats abandonnaient leurs positions et leurs armes, chacun pour soi, ils s’enfuirent pour sauver leur vie. En quelques heures seulement les campements d’ennemis ont été investis par les troupes de la monarchie légitime. Cette victoire permettait à Ponhea Chanreachea de récupérer beaucoup de vivres et des armements de toutes sortes.
Parlons une servante de la Dame Khieu. Après la mort de sa maîtresse, pour la suivre dans le monde des morts, elle décida de se noyer dans la rivière de Purthisath. Le lieu de suicide se trouvait tout près du marché, nommé marché en bas. À cet endroit, il y avait trois grandes termitières. Selon la croyance de la population de cette contrée, laquelle subsiste jusqu’à aujourd’hui, les âmes de Dame Khieu, Moeung et ses deux fils, devenant génies, venaient habiter dans ces termitières : Termitière du nord, habituée par l’âme de la dame Khieu, était sous les auspices du roi ; termitière du Sud, habité par l’âme de Moeung, était sous les auspices du gouverneur ; termitière de l’Ouest, habitués par l’âme des deux fils de Moeung, était sous les auspices de la population de la montagne de Kravagne (Kravagne = Cardamome). Quant à l’âme de la servante, elle venait hanter une île de la rivière de Purthisath. Cette île était sous les auspices du gouverneur de la province de Pursat.
La termitière de Dame Khieu, appelée la « Termitière Kanthaug Khieu (Kanthaug = Récipient en feuille de végétaux) : Selon la croyance de la population, si cette termitière était en bon état, on dit que le Roi règne en paix. Si elle s’abîmait, on dit que le Roi a des soucis, ou est malade. Si elle s’était fendillée, on dit que le Roi va mourir.
La termitière de Moeung, appelée la « termitière Kleing Moeung ou Klag Moeung (mot thaïlandais) » : Selon la croyance de population, si cette termitière était en bon état, on dit que le gouverneur gouverne sa province en paix. Si elle s’abîmait, on dit que le gouverneur a des soucis, ou est malade. Si elle s’était fendillait, on dit que gouverneur va perdre la charge du gouverneur.
La termitière des deux fils de Moeung, appelée la « termitière de cardamome » : Selon la croyance de population, si cette termitière était en bon état, on dit que les plantes de cardamome donnent beaucoup des fleurs. Si elle s’effritait, on dit que les plantes vont brûler par le feu. Si elle était abritée par des animaux, on dit qu’il va avoir des étrangers qui viennent emparer des fleurs.
Le lieu où la servante s’est suicidé : Selon la croyance de la population, si cette rive n’érodait pas par le courant d’eau, on dit que le gouverneur gouverne sa province en paix. Si elle érodait par le courant d’eau, on dit que le gouverneur a des soucis dans son travail ou dans ses affaires familiales. Si elle se casse, on dit que gouverneur va perdre la charge du gouverneur.
Nous ouvrons une parenthèse pour parler la cérémonie de vénération des âmes de Klein Moeung, dame Khieu.
Le texte nous apprend ceci :
1. Un jour choisi dans le courant du mois d’avril, le chef des morts (Mé Smeung) se déguise en chasseur selon l’habitude de Moeung. Pendant la cérémonie, au matin, il y a des danseurs portant sur leur tête des cornes de bœuf sauvage qui dansent, accompagnés par le chant et la musique « Leang Arak » (Arak = génie protecteur).
2. Les objets des offrandes sont : une paire d’assiette de nourriture, cinq feuilles d’argent, une étoffe blanche, cinq bougies, quatre arecs amincis ou taillés, quatre arecs parfumés, une paire de tête d’éléphants, une paire de poulets bouillis, quatre autels bas de fruits, dans chaque autel il ya six cents grammes de riz, deux mille arecs, deux bouteilles de vin.
3. Pour les offrandes à la dame Khieu, il y a mêmes objets que Moeung, mais on remplace la paire de nourriture par un récipient de desserts, de nourriture et sept oeufs.
4. Le jour d’évocation l’esprit de génie, la population des quatre coins du district amènent l’eau pour offrir au gouverneur. Celui-ci la versera au milieu de chaque termitière. Si l’eau coule en plus grande quantité dans telle ou telle direction, on dit que cette direction va avoir beaucoup de pluie.
Quant au lieu de suicide de la servante, appelé la « place de Daun Peng » (la dame Peng), une fois par an, le gouverneur et la population offrent un grand récipient (Kanthaug) de nourriture, de dessert et sept œufs pour demander sa protection. Selon la croyance, si on ne faisait, la population va avoir toutes sortes de maladies.
Revenons aux affaires du pays. Après la victoire, Ponhea Chanreachea invita des moines à célébrer des cérémonies religieuses pendant trois jours pour honorer la mémoire des quatre héros qui ont sacrifié leur vie pour la patrie. Après quoi, il nomma Vibol Reachea Keo, gouverneur de Pursat et lui conféra le titre « Chao Ponhea Sourkir Lauk ». Il nomma aussi Chao Ponhea Tekchès Sok, gouverneur de la province d’Amerak Kiri Bo avec grade de dix houpoin (grade de grand gouverneur) et lui conféra le titre « Chao Ponhea Sangkram ».
Après la cérémonie, au petit matin, il y avait un homme, nommé Jay qui venait offrir à Ponhea Chanreachea un grand éléphant de six hat et douze thap (un hat = 50 cm, un thap = épaisseur d’un doigt). Cet éléphant était bien dressé par son cornac. Ponhea Chanreachea étant très content et prit cet éléphant comme sa monture de guerre. Il lui donna un nom « Preah Pijay Kor Chir », le nom de son maître cornac. Après quoi, il nomma Jay gouverneur de la province de Krang. Pendant cette période, Ponhea Chanreachea avaient reçu beaucoup de présents de la part de la population : 35 Éléphants, 30 chevaux. Ces donateurs ont reçu de retours des récompenses en pièces d’or ou d’argent ou des grades dans la fonction publique.
La victoire de Ponhea Reachea s’imposait aux généraux de Kân, Chao Fa Kao et Ponhea Keo de se retirer de la province de Pursat pour se réorganiser dans la province de Krakor. Cette retraite donna un certain répit à l’armée de Chanreachea. Mais quatre jours après, les 30 000 hommes de Kân revenaient pour assiéger à nouveau la citadelle d’ennemis. Arrivée à Pursat, faute d’effectifs, Chao Fa Keo ordonna à ses troupes de camper à une bonne distance de la citadelle pour attendre l’arrivée des renforts, dirigés par le général Ouktey Thireach, gouverneur d’Asanthouk. Ayant appris le retour des troupes d’ennemis, Ponhea Chanreachea ordonna immédiatement au général Keo de conduire une armée d’avant-garde de 5 000 hommes pour affronter les troupes du général Keo et au général Sok d’attaquer les troupes du général Chao Fa Kao et lui-même à la tête d’une armée de 15 000 hommes pour appuyer ces opérations. Il confia 3 000 hommes à son oncle et à un certain officier, nommé Vieng de protéger la citadelle. Avant de lancer les attaques contre les ennemis, Ponhea Chanreachea ordonna au Chef des morts Chan de célébrer la cérémonie pour faire appel d’aide des morts, dont Kleing Moeung était chef. Quelques heures seulement après la cérémonie, on entendait les bruits de partout. Aussitôt, Ponhea Chanreachea, s’assit sur la tête de son éléphant de guerre, donna l’ordre de battre des tambours pour signaler à ses troupes l’ordre d’attaque. Les assauts des troupes de Ponhea Chanreachea ont été repoussés par des tirs de l’arc et armes à feu d’ennemis. Après quelques heures de combat, on entendait à nouveau des bruits de partout et la terre commençait à trembler dans les camps de l’armée de Kân. Ce phénomène provoquait une panique générale dans les rangs d’ennemis. Les soldats abandonnèrent leurs positions de combat et s’enfuirent pour sauver leur vie. Le général Keo monta immédiatement sur son éléphant et ordonna au cornac d’engager sa monture dans la bataille. Il cria de toute sa force à ses soldats de n’avoir pas peur de ces bruits et de reprendre leurs positions de combat. Keo, fils de Moeung, ayant entendu le cri martial, poussa sa monture à la rencontre de son ennemi. C’était un dual à mort entre deux Keo. Vu la charge de la monture du fils de Moeung, l’éléphant du général Keo poussa un grand cri et s’engagea immédiatement dans le combat. C’était le combat entre les bêtes. Cette précipitation fit perdre l’équilibre de son maître. Celui-ci tomba sur les défenses de la monture du fils de Moeung. Ce dernier se pencha vers le corps du général Keo, avec un geste mécanique, il lui trancha la tête. Saisi la tête sans corps de son adversaire, il se mit debout sur la tête de sa monture et la montra aux soldats ennemis. La mort du général Keo fut suivie de graves désordres chez les soldats de Kân. Ils s’enfuirent en désordre pour quitter les champs de bataille. Keo, le victorieux, retourna à la citadelle avec la tête de son ennemi pour la montrer à Ponhea Chanreachea. Celui-ci, étant content, ordonna à Keo de l’exposer au public. Ceci était considéré par Chanreachea comme un excellent moyen de propagande. Cette victoire permettait encore une fois à Ponhea Chanrechea de récupérer beaucoupo de vivres et des armes de guerre des ennemis. Après cette victoire, Ponhea Chanreachea à la tête de son armée, reprit sa marche en avant pour investir la province de Krakor. Là-bas, il fit construire une fortification et nomma un nouveau gouverneur. La mission du gouverneur était de collectionner des vivres auprès de la population pour constituer une réserve pour la garnison de cette province. Après quoi, il poursuivit son offensive en passant par les provinces de Krang, Romlaug, à destination Klong. Là-bas, il fit construire une autre fortification, et nomma un nouveau gouverneur pour mission de collecter des vivres auprès de la population. Ensuite, il se rendit visite à une pagode Brap dans la commune Prasat, district de Klong pour honorer la statuette du Bouddha. Là-bas, il pria le Bouddha pour qu’il gagne la guerre contre Kân. Après cette visite royale, la population appelle cette pagode « Vat Preah Chiv Loung Bân » (pagode de la prière du roi). Après cette prière, Ponhea Chanreachea poursuivit son chemin à destination de la province d’Amerak Kiri Bo. Ayant appris l’arrivée du roi légitime, la population de cette province se souleva contre l’ancien gouverneur. Celui-ci s’enfuit avec les membres de sa famille à la province Rolir Phiir.
À Rolir Phiir aussi, Samdech Chao Ponhea Chanreachea fit réparer un ancien du temps d’Angkor. Il restait trois jours à cet endroit. Puis, il partit avec ses troupes au Sud de la province d’Amerak Kiri Bo où il voyait un grand terrain plat, sur lequel, il jugea bon de bâtir une fortification pour son armée. Une fois les travaux avaient été terminés, il abandonna l’ancien fort pour venir s’établir dans la nouvelle fortification. Pour cette raison, la population donnait le nom de l’ancien fort le « vieux fort ». Cette appellation subsiste jusqu’à aujourd’hui.
Au moment où Chanreachea habitait dans la nouvelle fortification, il y avait un bonze, chef de pagode, nommé Jay, son titre religieux était Mongkol Satha. Il venait au nouveau fort pour offrir au roi légitime une pirogue de course, nommé « Saray Andette » (des algues flottantes). Cette pirogue avait son histoire : À la fin du règne du roi Sakunbât, ce bonze a caché un tronc d’arbre de qualité dans une plaine, située au milieu d’une forêt. On raconte aussi pendant la saison sèche, les gens voyaient des éléphants sauvages, qui sont venus couvrir ce tronc d’arbre avec les algues afin de le protéger contre les rayons du soleil. À la fin de la guerre, ce bonze a fait construire une pirogue avec ce tronc d’arbre par ses disciples. Cette pirogue a une réputation de « vitesse du vent ». Chaque matin, le chef de pagode prenait cette pirogue pour quêter de nourriture dans des endroits, situés à une grande distance de son lieu d’habitation, et l’on dit que quand il revient à sa pagode, la nourriture quêtée est encore chaude. Pour cette raison, on donne le nom à cette embarcation « pirogue de nourriture quêtée qui reste toujours chaude ».
Preah Chenreachea accepta ce présent avec le cœur de joie, il dit au vénérable ceci : « Preah Chitong, je suis très content de votre présent précieux. Comme vous le savez, aujourd’hui, je suis encore pauvre j’e n’ai pas les moyens pour vous récompenser, mais rassurez-vous, quand je serai maître du pays tout entier, je vous récompenserai selon votre mérite ».
Note : Jadis quand un laïc s’adresse des paroles à un moine qui est membre de sa famille, il l’appelle Chitong).
Après quoi, Chanreachea forma un équipage de 124 Chithay pour tester la vitesse de cette pirogue. Sans aucun doute, sa réputation fut bien confirmée par ce test.
Note : Il est probable que jadis ce nom est utilisé pour désigner les soldats de pirogue de guerre.
Au cours d’une audience habituelle, Samdech Chao Ponhea Chanreachea, dit à ses ministres et ses généraux : « J’ai beaucoup de chance d’avoir l’éléphant blanc « Preah Pichay Kakcheth » comme monture de guerre, la pirogue « les algues flottantes » comme moyen de déplacement par voie fluviale, avec vitesse de vent ». Il ordonna aux officiers du corps de génie de construire des abris pour l’éléphant et la pirogue. Il donna un nom à cette pirogue, « Preah Tineing Chakrapath » (Bateau impérial).
Quelque temps après, il poursuit la pénétration dans le territoire du Sdach Kân. Arrivée à la plaine Sap Angkam, à l’est de la province de Kompong Chhnaing, il rencontra l’armée de Chao Fa Kao. Il convoqua ses généraux et leur dit ceci : « Quand nous nous sentons fort, il faut nous allons de l’avant ». Aussitôt dit, il ordonna immédiatement à ses troupes d’attaquer les campements d’ennemis. Après quelques heures de combat, le champ de bataille, rempli des fumées du sang, se transforma en lieu de massacre, où les guerriers des deux côtés ne se perdirent pas leur courage de s’entre-tuer. Certains de ces soldats se battaient même avec leurs couteaux, parce que leurs lances et leurs épées sont cassées. Soudain, la monture de Chao Fa Keo, sursauta pour une raison inconnue, son corps se heurta à un arbre, dans lequel il y avait un grand nid de bourdons. Ce heurt provoqua la sortie des insectes de leur nid. Ils piquèrent tous les êtres humains en mouvement, en particulier les hommes de Kân. Ce phénomène extraordinaire fit fuir les soldats de Kân. Ils abandonnèrent leurs positions de combat. Le général Chao Fa Kao ne savait plus quoi faire pour rétablir l’ordre dans ses rangs. Il courut à gauche à droite, sans but précise. Chanreachea poussa sa monture à la rencontre du général ennemi. Le duel entre deux chefs suprêmes militaires commença immédiatement. Après quelques joutes de combat, Chanreachea prit l’avantage et blessa gravement Chao Fa Kao à l’épaule. Celui-ci avec l’aide de ses gardes de corps réussit à s’enfuir. Ayant appris la défaite de Chao Fa Kao, le gouverneur de la province de Rolir Phiir, nommé Sénay Akthipdey Som, s’était réfugié à Phnom-Penh, d’où il mourut quelque temps plus tard. Quant au gouverneur de la province de Longvek, il demandait sans hésitation la soumission à Chanreachea. Ce dernier accepta cette soumission. La victoire d’un grand retentissement de Chanreachea, lui ramena toute la population des provinces conquises. Elle rendait aussi à Chanreachea maître d’une grande région riche en agriculture. Il y a un proverbe cambodgien qui dit « On cultive le riz avec l’eau, on fait la guerre avec le riz ».